01 juillet 2013

Une lecture critique des Masques de Nyarlathotep – 2



Ce billet fait suite à celui-ci.

Voici comme promis quelques idées pour faire tourner la campagne d’une façon plus conforme à mes goûts.
Car si l’approche pulp ne me convient pas (c’est un « genre » qui ne me plaît tout simplement pas), je continue à rêver en lisant les livrets, avec l’envie d’en faire quelque chose. Mais quoi ?

A la base il y la nouvelle Nyarlathotep. Je n’ai pas toujours été un grand fan de Lovecraft, un auteur que j’ai découvert, comme beaucoup, via le JdR. Je l’ai lu à peu près en même temps que ma première édition de l’Appel de Cthulhu et ces textes verbeux et chargés d’adjectifs ne m’avaient pas convaincu du tout (mon appréciation a changé, on pourra le voir ici). Mais j’ai tout de suite aimé Nyarlathotep, son style prophétique et ses visions de fin du monde (je m’en suis d’ailleurs inspiré pour un texte personnel).
Le texte de la nouvelle est fourni avec la campagne et la nouvelle elle-même est en quelque sorte l’horizon du récit : ce qui arrivera si les investigateurs échouent. Mais je rêve d’exploiter un peu mieux le personnage de Nyarlathotep : après tout c’est le seul des monstres lovecraftiens à marcher parmi les hommes…

Attention, suite à cette ligne, il y aura de nouveau des spoilers.


C'est alors que Nyarlathotep arriva d'Egypte. Qui il était, nul n'en savait rien ; mais, de vieux sang indigène, il ressemblait à un pharaon. (…) Nyarlathotep vint dans les pays civilisés, basané, mince et sinistre, achetant sans cesse d'étranges instruments de verre et de métal, qu'il combinait en nouveaux instruments plus étranges encore. Il parlait beaucoup de sciences (d'électricité et de psychologie) et faisait des démonstrations de puissance qui laissaient ses spectateurs sans voix et firent croître sa renommée dans des proportions inouïes. Les hommes se conseillaient mutuellement d'aller le voir, et frémissaient.

Pourquoi ne pas alors exploiter l’excellente idée utilisée par Tristan Lhomme dans sa série de scénarios Etoiles Propices des Casus Belli nouvelle (nouvelle nouvelle) édition, numéros 1 à 3 : Nyarlathotep est là, l’homme étrange fascinant les foules marche dans le monde.
Imaginons qu’en 1925, un gourou venu d’Egypte, surfant sur la vague de l’égyptomanie, fasse la tournée des grandes villes du monde (occidental) en promouvant un discours étonnant, mêlant science, tradition millénaire et formation d’un homme nouveau. Une voix promettant la libération des anciennes contraintes (le temps, les vieilles sociétés…), des corps musclés et bronzés, une forme d’amour libre, la puissance du savoir… Un mouvement qui aurait pu être illustré par les folies futuristes et l’art fasciste. Ce mouvement transnational et transreligieux s’appellerait la Société de l’Ankh. Et son gourou se nomme bien sûr Nyarlathotep. Participer aux réunions de l’Ankh, écouter les discours du maître rend les gens meilleurs, plus libres, plus forts. Le livre du maître, les fontaines du savoir, a été traduit en quarante langues. Des antennes de la Société de l’Ankh se sont installées partout dans le monde. Je vois cette secte un peu comme celle d’Ami, dans 20th century boys.
Si le plan de N réussit, elles seront une structure de renversement du monde. S’il échoue, tout cela sera vite oublié parmi les nombreux mouvements spirituels étranges que les années 20 ont porté.
Dans l’entourage des PJs, beaucoup sont acquis à l’Ankh. Une partie de l’aventure pourrait alors consister à tenter de trouver des liens (pas évidents) entre la société de l’Ankh et les cultes bizarres. D’autant que la propagation de cette société, née en Egypte, fondée au Kenya, semble suivre à l’envers les traces de l’expédition Carlyle…



Cédric Ferrand disait sur un réseau social qu’il avait associé étroitement ses PJs aux membres de l’expédition, pour faire de l’aventure la quête de proches disparus. J’avais un peu la même idée. Et d’ailleurs, pourquoi ne pas faire d’Erica Carlyle un personnage joué ? Bien sûr, cela pose quelques soucis : par exemple, peut-on faire commencer le récit en 1920 avec la première enquête sur la mort de Carlyle ? A moins qu’Erica n’ait alors été trop jeune pour y assister et que l’enquête ait été menée par un tuteur, justement mort en 1925, alors qu’Erica atteint sa majorité et prend la tête de ses affaires… Mais en voilà une au moins qui dispose d'un puissant motif, et de moyens pour payer les billets de paquebot.

Une dernière chose : l’histoire repose beaucoup sur l’enquête de Jackson Elias, ce qui est une bonne idée. Mais Elias a-t-il été le premier à se faire tuer par un culte lié à N ? Lui-même n’aurait-il pas suivi les traces d’un ou de plusieurs autres ? Ces mentions et ces traces pourraient servir à en rajouter dans la peur et l’inquiétude. Qu’on sente bien que tous ceux qui s’intéressent à ces drôles de religions minoritaires finissent mal…


(à suivre si viennent de nouvelles idées)

Nyarlathotep, Rotomago et Julien Noirel, 2007


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